La Cour de cassation et la cour d’appel de Paris ont récemment apporté des précisions importantes concernant la mise en œuvre de pratiques restrictives de concurrence, d’une part, sur le champ d’application de l’avantage sans contrepartie, et d’autre part, sur la sanction du déséquilibre significatif.
Selon l’article L.442-1 I 1° du code de commerce, l’avantage sans contrepartie est défini comme le fait « d’obtenir ou de tenter d’obtenir de l’autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie », tandis que le déséquilibre significatif suppose « De soumettre ou de tenter de soumettre l’autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties » (article L. 442-1 I 2° du code de commerce).
Dans un arrêt du 11 janvier 2023 (n°21-11.163, publié au Bulletin), la chambre commerciale de la Cour de cassation censure une décision de cour d’appel qui avait refusé de contrôler sur le fondement l’avantage sans contrepartie une remise du prix systématique fondée sur le crédit d’impôt accordé au cocontractant ainsi qu’un escompte appliqué automatiquement sur des factures pourtant réglées avec retard, au motif que seule l’existence d’un déséquilibre significatif permettrait le contrôle judiciaire du prix. Selon la cour d’appel, le déséquilibre significatif impliquant d’apporter la preuve d’une « soumission ou d’une tentative de soumission » d’une partie, le prix obtenu sous une telle contrainte n’aurait alors « pas fait l’objet d’une libre négociation ».
La Haute juridiction prend le contrepied de cette décision et constate que « l’application de l’article L. 442-6, I, 1° (désormais 442-1, I, 1e), du code de commerce exige seulement que soit constatée l’obtention d’un avantage quelconque ou la tentative d’obtention d’un tel avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu, quelle que soit la nature de cet avantage ». En conséquence, l’avantage qui est contrôlé judiciairement sur le fondement de l’avantage sans contrepartie peut être le prix contractuel d’une vente ou d’une prestation (sans contrepartie ou disproportionné), et ce, y compris s’il a été librement négocié par les parties.
La charge probatoire nécessaire pour engager avec succès une action fondée sur l’avantage sans contrepartie est donc réduite par rapport à une action fondée sur le déséquilibre significatif car dans la première il n’est pas obligatoire de prouver que le contrat n’a pas fait l’objet d’une libre négociation.
Les sanctions du déséquilibre significatif et de l’avantage sans contrepartie
Traditionnellement, la victime d’une pratique restrictive de concurrence peut solliciter du juge :
Dans une série de 7 arrêts rendus le 8 février 2023 (n° 20/01748, 20/01712, 20/04558, 20/04557, 20/04561, 20/04545, 20/01706), la cour d’appel de Paris s’est prononcée sur l’application effective de ces sanctions en cas de « déséquilibre significatif ». Ces sanctions pourraient aussi être applicables aux cas de contrôle du prix contractuel sous l’angle de l’avantage sans contrepartie.
Ces procédures faisaient suite au prononcé de la nullité de clauses de résiliation et d’intuitu personae du contrat de franchise (type) du réseau « Pizza Sprint » et de la cessation de la pratique résultant de l’application de la clause d’approvisionnement minimum ordonnée sur le fondement du déséquilibre significatif par la cour d’appel de Paris, préalablement saisie par le Ministre de l’économie (CA. Paris., 5 février 2022, n°20/00737, voir actualité Altair Avocats, mars 2022). Les franchisés, tirant les conséquences de la nullité de ces clauses, ont sollicité l’annulation du contrat de franchise (cette nullité présentant l’intérêt d’obtenir la restitution des redevances versées au franchiseur), et à titre subsidiaire, la résiliation du contrat aux torts du franchiseur.
Dans ces différents arrêts, la cour d’appel :
Les sanctions prononcées par la cour d’appel pourraient probablement, dans certains cas, s’appliquer aussi aux sanctions attachées au contrôle judiciaire du prix sur le fondement de l’avantage sans contrepartie.
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Altaïr Avocats